Rue Taranne
11/04/2004
  Dans ma hâte de déménager, j'ai posté hier un lien erroné vers le nouveau Rue Taranne, pointant vers une adresse alternative du blog, ce qui fausse les statistiques.
La bonne adresse est la suivante: http://www.peres-fondateurs.com/taranne
Toutes mes excuses pour cette erreur.


 
11/03/2004
  Rue Taranne, c'est fini...

... sur Blogspot. Votre libéral-conservateur préféré (oui, bon...) déménage et perche désormais à l'adresse suivante: http://rue-taranne.tk
Je remercie du fond du coeur tous ceux et toutes celles qui m'ont fait l'honneur (l'aumône) de lire ma prose depuis un an, et leur donne rendez-vous dans la nouvelle Rue Taranne pour de nouvelles aventures au pays de la Réaction Râleuse.

Bien à vous,
Taranne
 
10/18/2004
  L'Heure du Con(te)

Les foucades gargouillesques de l'Histrion du Quai d'Orsay (transféré depuis Place Beauvau) l'avaient laissé présager, et certaines déclarations et prises de position incongrues de Notre Père A Tous - pour ne rien dire de ses fréquentations pour le moins douteuses - n'avaient rien fait pour nous rassurer. Mais la dernière sortie de notre glorieux Premier Ministre ne laisse plus la moindre place au doute: La France est aux mains d'une bande d'illuminés.

La "petite histoire" des quatre bougies de Jean-Pierre Raffarin à Bucarest

BUCAREST (AFP) - Le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a terminé un discours prononcé dimanche devant la communauté française de Bucarest par une "petite histoire" sur les valeurs de la "France universelle" qui rendent "le monde plus heureux"."Je voudrais vous dire une dernière petite histoire avant qu'on se quitte. C'est une petite Anna qui entre dans une chapelle où elle voit quatre bougies", a-t-il raconté au premier jour d'une visite officielle en Roumanie."La première bougie dit: Je suis la bougie de la liberté mais dans ce monde où il y a tant de bureaucratie, encore tant de guerres, est-ce que cette bougie a encore des raisons d'être ? Et la bougie, progressivement, s'éteint"."La seconde, celle de la fratenité, elle aussi faiblit et dit: Finalement dans ce monde d'égoïsme, d'individualisme, ce monde de l'argent, est-ce que la fraternité a encore un avenir ? Et la bougie s'éteint"."La troisième, celle de l'égalité, dit: Ce monde est tellement disparate, plus personne ne reconnaît l'égalité des chances. C'est trop difficile. Et la bougie s'éteint"."La quatrième, elle, s'appelle la France universelle. Et elle dit à la petite Anna: Avec moi, tu peux rallumer les trois autres et tu verras le monde plus heureux"."Aujourd'hui, la France est entendue dans le monde quand elle porte ses valeurs, ses idées", a poursuivi le Premier ministre, reprenant ainsi un discours bien rôdé dans ses interventions devant des Français de l'étranger."Nous avons besoin de nous ouvrir. La France n'a pas d'avenir dans le repli sur elle-même", a-t-il aussi mis en garde.


Imaginons un instant que ce soit Bush, et non Raffarin, qui se soit aventuré à raconter cette belle histoire lors d'un meeting électoral. On voit d'ici les gorges chaudes qu'en feraient les journalistes de l'EFG, taxant le président-candidat de nationalisme, d'impérialisme, de bonne conscience, tout en soulignant la niaiserie de cette fable de La Fontaine relookée par Point à la Ligne. D'aucuns se seraient même interrogées sur la santé mentale de l'auteur, visiblement des plus compromises.
Mais c'est à notre glorieux Premier Ministre, et non à l'hôte de la Maison Blanche, que nous devons ce grand moment d'éloquence azimutée qui, du coup, passe comme une lettre à la poste. Il y aurait pourtant beaucoup à en dire, tant cette raffarinada maxima est révélatrice de la mélasse idéologique dans laquelle s'agite ce gouvernement, où les éléments les plus désagréablement constitutifs de l'identité française - chauvinisme, antilibéralisme, haine de l'individu, culte de l'égalité au détriment de la liberté - se mélangent en un brouet infernal. De tels gouvernants, le libéral ne doit rien attendre. Si ce n'est le pire. C'est à dire ça.
 
10/17/2004
  Et si Kerry était élu...

... Serait-ce vraiment une tragédie? Je me pose la question. Mes fidèles lecteurs savent que je n'ai jamais donné dans l'anti-Bushisme primaire, et ce n'est pas maintenant que je vais commençer. Une victoire de Bush ne me plongerait certes pas dans un abîme de tristesse - mais elle ne me comblerait pas de joie non plus. Force est en effet de reconnaître que l'hôte actuel de la Maison-Blanche est devenu en quatre ans, à son corps défendant, le plus sûr allié des anti-US de tout poil et de toutes orientations.
Aux ennemis de la civilisation américaine, il offre un magnifique repoussoir qui leur permet de se défouler en toute quiétude sur une société présentée comme arriérée, fanatique et intolérante, sous couvert de pourfendre l'hydre évangélico-neoconservatrice en lui opposant "l'autre Amérique" - celle, européanisée, de la Californie et de la Côte Est.
Aux gauchistes et altermondialistes, il offre un punching-ball commode, incarnation de tous les maux qu'ils prètent à "l'ultralibéralisme" et à "l'impérialisme" yankees.
Aux "multilatéralistes" avides de puissance enfin, il est une bonne excuse pour saboter l'Alliance Atlantique (dans tous les sens du terme) et poser une Europe mal unie en contrepoids afin d'imposer son modèle social-démocrate comme nouvelle référence politique et culturelle. Quitte pour cela à tendre la main à des régimes aux valeurs difficilement compatibes - c'est peu de le dire - avec les nôtres.
En bref, le pauvre George W. sert tout le monde, sauf ses concitoyens, et ce, je le répète, à son corps défendant. On peut donc éprouver une légère inquiétude à l'idée de le voir reconduit, quoiqu'une majorité réduite comme elle semble s'annoncer pour le gagnant puisse l'inciter à mettre un peu d'eau dans son vin.
Mais s'il ne le fait pas...
S'il ne le fait pas, l'anti-américanisme primaire continuera de se déchaîner, sous couvert d'anti-bushisme. Le mouvement altermondialeux marquera des points dans le débat public. L'Europe-contrepoids voulue par Adolf et Philippe Gerhard et Jacques deviendra à plus ou moins long terme une réalité. Les américanophiles, quant à eux, devront faire profil encore plus bas que pendant les quatre années précédentes.
Je ne sais pas pour vous, mais moi cela ne me tente pas.
Ne croyez pas pour autant que je sois dupe des capacités réelles de Kerry. Je suis fort bien renseigné à ce sujet. Mais il bénéficie - Dieu seul sait pourquoi - d'un fort capital-sympathie chez les Européens, probablement parce qu'il leur semble (à tort) partager les mêmes valeurs. Et il peut donc restaurer l'image des Etats-Unis comme avant-garde de la société occidentale et ainsi déjouer les plans des partisans d'un autre monde qui est possible mais pas inéluctable.
On est parfois obligé de sacrifier un pion afin de gagner la partie, et peut-être le temps est-il venu pour tous les libéraux et les américanophiles de tenter le gambit, même si le coeur ne leur en dit pas beaucoup, afin de pouvoir mieux ensuite terrasser leurs véritables adversaires.
 
10/16/2004
  Bush pas beau, nous on préfère Hu Jintao

Superbe article d'Emmanuel Schwartzenberg dans le numéro du jour de l'Organe Officiel de Propagande Chiraquo-Raffarinienne*, qui nous apprend que notre bien-aimé gouvernement, dont la sinophilie ne connait plus de limites, s'engage sur la voie de la collaboration avec ses homologues de l'Empire du Milieu. C'est qu'il faut ce qu'il faut pour défendre la diversité culturelle contre la sous-culture anglo-saxonne.

Convention internationale
Les deux pays se sont mis d'accord pour élaborer un traité au sein de l'Unesco La France et la Chine s'allient pour défendre la diversité culturelle

Shanghaï : Emmanuel Schwartzenberg [16 octobre 2004]

La France et la Chine ne se font pas de la culture la même idée. Le premier érige le culte de la différence en mode de vie et soutient une politique volontariste.


Parler de "culte de la différence" à propos d'un pays où chaque sondage vous donne des majorités oscillant entre 70% et 80% et où l'imprudent qui s'avise de tenir des positions tant soit peu incorrectes se voit illico traiter de "raciste", de "réactionnaire" et d'ennemi du peuple, ne peut que relever du second degré. Enfin, on l'espère, parce qu'il y a de quoi s'inquiéter pour les capacités cognitives de M. Schwartzenberg si il est vraiment sérieux. A noter que le terme "volontariste", si souvent utilisé pour flétrir Bush et les néoconservateurs, devient subitement flatteur quand il s'applique à la politique frenchie... Les subtilités langagières de la presse gouvernementale me laisseront toujours pantois.

Le second ne dissocie pas le monde marchand de celui des activités culturelles

En bref, le régime communiste de Pékin - dont personne ne viendra remettre en cause l'orthodoxie - est moins gauchiste que la République Française et son président (mal) étiquetté de droite. On s'en doutait un peu, remarquez...

ce qui l'incite à développer une politique ultraprotectionniste.

Ah, parce que l'exception culturelle, l'avance sur recettes et les quotas de production française ne relèvent pas d'une politique ultraprotectionniste, peut-être? Mon inquiétude pour les neurones de M. Schwartzenberg ne cesse de croître, et nous ne sommes pourtant encore qu'au tout début de l'article!

Il suffisait de voir Parade, le célèbre rideau peint par Picasso pour un ballet de Diaghilev, sur une musique de Satie, déployé dans le hall d'un centre commercial sur le lieu de passage des ferries et des transports en commun, pour comprendre que les Chinois n'ont pas la même attitude que nous lorsqu'il s'agit d'admirer une oeuvre d'art.

Pas la même attitude que toi, c'est bien ce que tu veux dire, hein, Manu?
Il faut dire que les pauvres Chinois, même aux heures les plus sombres de la Révolution Culturelle, n'ont pas dû subir un lavage de cerveau de grande ampleur comme celui réalisé chez nous depuis quarante ans sous la houlette de Dédé Malraux puis de son génial successeur Djack. Gageons que les progrès de l'entente sino-française permettront aux malheureux de découvrir bientôt les joies des MJC, fêtes de la musique, journées du patrimoine et autres Nuits Blanches.

Et que dire des salles de cinéma régulièrement implantées au dernier étage des centres commerciaux, qui mettent en rage Marin Karmitz.

Il n'en faut pas beaucoup pour le mettre en rage, de toute façon. Et puis en quoi cela le regarde-t-il? Avec le réseau de salles qu'il possède, il a quand même besoin d'aller en Chine pour voir des films?

pourtant ces deux pays sont en train, dans la foulée du voyage présidentiel, de participer à l'élaboration d'une convention internationale culturelle annexée à l'Unesco. Certes, la France, sous l'impulsion de son président, a pris depuis longtemps la défense de la diversité culturelle – c'est-à-dire le droit pour chaque pays de décider soi-même de sa propre culture – à l'échelle mondiale.

C'est bizarre, mais je croyais que le "droit de décider soi-même de sa propre culture" était une prérogative de l'Individu et non des hurluberlus qui prétendent le gouverner. Mais il est vrai que l'Individu, surtout quand il fait de "mauvais" choix, n'est pas en odeur de sainteté en France, et cela fait un point commun (un de plus) avec Hu Jintao et ses potes. J'ai intérêt à profiter de mes disques de Frank Sinatra et des films de John Ford, Raoul Walsh et autres qui composent l'essentiel de ma vidéothèque avant qu'une loi scélérate ne m'oblige à me coltiner les ritournelles de Barbara en visionnant l'intégrale de Philippe Garrel.

Mais le soutien que la Chine lui apporte est déterminant. Il entraîne avec lui celui du Brésil et rend en quelque sorte irréversible le processus d'adoption du texte en 2005.

Ah, parce que Lula le Rouge est dans le coup, lui aussi? Il ne manque plus que Castro et Chavez pour que la fine fleur des gouvernements marrons soit réunie. La France est bien épaulée dans son combat contre l'uniformisation.

Officiellement, la Chine préfère parler «de tradition et de modernité», mais, en fait, il s'agit pour elle de prendre place sur la scène mondiale et de participer à un dialogue culturel élargi qui s'installe à côté du discours américain omniprésent.

Juste une question: pourquoi est-il aussi "omniprésent", ce discours américain? Ne serait-ce pas parce que les gens préfèrent aller voir le nouveau blockbuster made in Hollywood plutôt qu'une production locale fauchée, prétentieuse et chiante comme la pluie? De même qu'ils préfèrent lire le dernier Stephen King ou écouter Norah Jones plutôt que se détruire la cervelle à coups de Ilfriede Jelinek ou de Jean-Louis Murat? En bref, le "discours américain" ne serait-il pas omniprésent parce que les autres n'intéressent personne? Mais bon, on connait d'avance la réponse: ultralibéralisme, impérialisme, standardisation, subventions nécessaires, etc.

Pour cet empire, il s'agit moins de contenir la libération des biens et services culturels que de lutter contre l'homogénéisation économique perceptible à chaque coin de rue.

Comme pour la France, quoi? Après tout, il est bien normal de lutter contre la libéralisation des biens culturels si l'on est déjà opposé à celle du gaz, de l'électricité, des transports ferroviaires et autres services "publics". Incroyable tous ces points communs que l'on trouve entre la France et l'Empire du Milieu en cherchant bien.

Sun Jiazheng, ministre de la Culture et président de l'Année de la France en Chine, ne s'y trompe pas quand il déclare : «La France se distingue par sa créativité, par ses capacités d'imagination, mais aussi et surtout par son esprit d'indépendance. C'est en cela qu'elle est pour nous source d'exemple.»

En clair: la France elle ferait n'importe quoi pour emmerder les Américains, et nous aussi, quoique pas pour les mêmes raisons, mais ça ces gros cons de gaulois n'ont pas besoin de le savoir pour l'instant. On va donc les utiliser en leur faisant croire qu'ils sont nos copains, ça marche à chaque fois.

Renaud Donnedieu de Vabres a honoré son hôte en jouant dans cette affaire de traité le rôle du pionnier. Il faut «que cette convention se situe au minimum sur le même pied d'égalité que les autres traités. Il faut lui donner une chance de dire le droit si une atteinte est portée à la diversité culturelle». Pour le ministre de la Culture, qui se veut rassurant, la convention Unesco ne remet pas en cause les accords existants, sauf s'il s'avère «qu'ils causent de sérieux dommages à la diversité des expressions culturelles ou constituent pour elle une sérieuse menace».

Chouette, encore un texte débile qui va rajouter un peu de pagaille à celle déjà existante. Dis nous, Renaud, qui décidera, et sur quels critères, que "de sérieux dommages" sont causés à la "diversité des expressions culturelles" ou "constituent pour elle une sérieuse menace"? Parce que tu sais, nous autres libéraux, on aurait tendance à penser que tout ça c'est du bla-bla pour dissimuler des objectifs protectionnistes. Mais il est notoire que nous avons l'esprit mal placé, que nous ne comprenons pas la nature sacrée des oeuvres d'art et que nous ne carburons qu'au profit, alors ça doit être pour ça que nous ne comprenons pas.

Le projet étudié actuellement par 71 pays parle de spécificité de biens et services, de primauté des droits de l'homme et de coopération internationale. Ce projet sera annexé au traité de l'Union européenne mais il n'y sera en aucun cas subordonné. La force d'un tel traité, s'il voit le jour, est symbolique autant que juridique. La Cour internationale de justice de La Haye pourrait être saisie de tout différend ayant trait à une question culturelle à moins que la convention n'institue, comme certains pays le souhaitent, une procédure d'arbitrage systématique.

En bref, encore une autre instance de régulation et donc une autre atteinte au libre-échange. Pas étonnant que les Français soient emballés! Quant à la perspective de voir les compétences incompétentes de la Cour internationale de justice de La Haye élargies à la vente des disques, des livres ou des séries télévisées, j'avoue un certain pessimisme, pour ne pas dire un pessimisme certain.

Mode de vie, édition, littérature, presse, artisanat, audiovisuel, patrimoine culturel, la liste n'est pas close des priorités que chaque pays voudrait mettre en avant. Si la France inclut l'audiovisuel, les pays anglo-saxons considèrent que c'est une industrie. Le Japon, hostile pour l'instant à la convention, va encore plus loin et juge que l'automobile, les jeux vidéo, les technologies sous toutes leurs formes sont des éléments culturels. Pour lui, un tel traité serait un frein à l'expansion économique. L'Italie, elle, craint que la liberté religieuse ne soit entravée.

C'est bon de voir qu'il existe encore deux pays (l'Italie et le Japon) qui gardent un minimum de sens commun. Mais ils devraient savoir que la France et ses alliés n'en ont rien à cirer de la liberté religieuse, et que Paris n'a rien contre le fait de freiner l'expansion économique des autres si cela peut cacher la stagnation de la sienne. On va en tout cas bien s'amuser à rédiger ce texte qui prétend défendre une culture dont la définition exacte pose tant de problèmes...

La culture étant la particularité de chaque pays, il ne serait guère aisé de parvenir à un accord commun si la nécessité d'un tel traité ne se faisait chaque jour de plus en plus pressante.

Pressante pour qui? C'est ce que l'on aimerait savoir, d'autant que c'est surtout la France qui pousse à l'adoption du texte - comme d'habitude, serait-on tenté de dire.

Le Canada et la Nouvelle-Zélande ont signé avec les États-Unis des accords de libre-échange, de libéralisation économique dans tous les secteurs et ils ne peuvent plus aujourd'hui prendre des mesures de protection de leur système audiovisuel. Le Chili, le Maroc, l'Australie se trouvent liés par un traité identique avec les Américains et ils ne peuvent plus également adopter la moindre disposition pour défendre leur patrimoine culturel.

S'en portent-ils plus mal? C'est la question. A laquelle cet article ne répondra pas, comme de bien entendu. On est un journaliste docile ou on ne l'est pas.

Si la convention Unesco avait été signée, ces pays auraient au moins pu l'opposer aux États-Unis.

Mais l'auraient-ils fait? Là aussi, on aimerait bien le savoir. Un poème c'est bien joli, mais un steack c'est encore mieux, comme le disait à peu de choses près Léon Tolstoï.

A ce jour, 25 pays sur les 148 appartenant à l'Organisation mondiale du commerce ont signé des accords avec les États-Unis, c'est dire si les 123 restants se trouvent concernés par cette réflexion. Grands absents du débat public, les États-Unis s'opposent à l'extension du principe de diversité culturelle. Pour eux, c'est moins l'idée d'un système de protection en tant que tel qui les préoccupe que la possibilité que cette convention favorise la mise en chantier, dans tous les pays rattachés à l'Unesco, de systèmes de défense de l'audiovisuel et de leur cinéma.

Allez hop, un petit coup de complotite: les Etats-Unis (ouh, les méchants!) ne visent qu'à rayer toutes les autres cultures de la surface du globe afin d'imposer leurs hamburgers et leurs séries télévisées. Mais on ne se laissera pas faire, ça non! Il importe donc de fermer les frontières et lancer au plus vite des programmes de subventions tous azimuts afin de maintenir sous respiration artificielle les cultures et traditions millénaires, à commençer par la nôtre, bien entendu.

Depuis leur victoire dans la bataille de l'exception culturelle, les Français savent que les Américains acceptent que l'on fige les positions acquises mais qu'ils s'opposent à toute initiative nouvelle. Cette hostilité ne l'inquiète pas outre mesure car elle se pense gagnante sur plusieurs points. Si la convention échoue, la mobilisation que cette discussion aura suscitée lui permettra de rassembler une majorité au sein de l'Union européenne et d'y associer les pays entrants. Cette charte incitera les Européens à taire leurs divergences et à parler d'une seule voix.

C'est-à-dire la nôtre? Encore une belle preuve de la vision si particulière que se fait notre gouvernement d'une Union Européenne qui ne serait rien d'autre qu'une France en plus grand, avec bien entendu les Français pour chefs de file. Une Europe où, comme dans la Patrie-des-Droits-de-l'Homme, il n'y aurait pas de place pour les divergences qui sont, chacun le sait, causes d'instabilité.

Avec les Chinois, la France joue un rôle moteur qui doit permettre à l'empire du Milieu de lui ouvrir les portes de la reconnaissance mondiale.

Y a pas à dire, je me sens vachement fier de contribuer à la respectabilisation des bouchers de Tien-An-Men et des apprentis-génocideurs du Tibet. Dommage que je n'aie pas un drapeau tricolore sous la main que je puisse agiter en signe de joie. Mais bon, c'est pas tout ça, il faudrait peut-être maintenant que l'on s'occupe de respectabiliser aussi la Corée du Nord, la Syrie et le Soudan. Alors la France pourra-t'elle considérer sa mission civilisatrice comme enfin achevée.

Le projet d'un Centre Pompidou à Hongkong, les expositions des Impressionnistes, l'ouverture d'un centre culturel à Pékin ne sont pas des opérations de communication destinées à favoriser les échanges économiques. Même si le succès déjà obtenu par Les Choristes, qui a dégagé 1,4 million de dollars de recettes, améliore l'image de la France. Ces initiatives contribuent à reconnaître la culture chinoise qui est, malgré la discrétion des officiels sur ce dossier, la seule question qui les préoccupe vraiment. Aujourd'hui, la Chine a autorisé vingt films étrangers seulement à être distribués sur ce continent. La France et l'Europe avec elle font le pari qu'en aidant ce pays à développer sa capacité de production et à préserver son identité, elle ouvrira davantage les portes aux cultures du monde.

Encore une preuve de ce que j'espère être l'ironie de notre plumitif de service: la culture chinoise est évidemment la seule qui intéresse le gouvernement chinois... de même que la culture française - ou ce qu'il en reste - est la seule qui intéresse vraiment Notre Père A Tous et ses acolytes. Entre hypocrites, on est fait pour s'entendre, et la diversité culturelle est une gigantesque hypocrisie qui entend moins préserver les cultures locales qu'empêcher la propagation d'une en particulier. De même que l'on saccage les McDo mais pas les pizzerias, paninis et autres restaurants asiatiques pourtant plus nombreux dans nos centres-villes, il n'y a rien de mal à ce que les salles obscures de Chine et d'ailleurs soient envahies par les productions étrangères, du moment que celles-ci ne sont pas américaines. It's not about culture, my friend. It's just about politics.

* Anciennement connu sous le nom de Figaro.
 
10/15/2004
  La solitude, ça n'existe plus


La dernière mode en matière de connerie urbaine, c'est le tramway. Paris aura bientôt le sien et rejoindra ainsi Bordeaux, Lyon, Montpellier et autres villes qui ont succombé aux charmes de cette merveilleuse machine à pourrir la circulation et à enlaidir les quartiers qu'elle dessert. Il faut dire que le tramway c'est silencieux, rapide et non polluant. Tout pour plaire, et tout le monde est content - enfin, presque tout le monde.Il y a bien, en effet, des automobilistes grincheux pour se plaindre de ce que chacun de leurs déplacements tourne au cauchemar à cause de tous ces feux rouges et sens interdits qui poussent comme des champignons sur le chemin de la Merveille. D'autres regrettent que l'on abatte des arbres (le comble pour un projet destiné à préserver l'environnement!) ou que l'on rase des quartiers entiers, sans parler des caténers qui ne sont pas franchement esthétiques. Mais nous sommes en France, chers amis, un pays où les mots "gouvernement de la majorité" prennent leur sens le plus totalitaire, et ces râleurs sont donc invités à imiter tous les minoritaires, tous les pas-contents, tous les dissidents - en bref, à fermer leur gueule et à admirer en silence les dernières prouesses de Big Brother.Et c'est qu'il y a de quoi admirer, en la circonstance, parce que Big Brother, cette fois, il a mis le paquet. Voilà plusieurs décennies qu'il s'emploie à normaliser notre vie, à la garantir contre tous les coups durs, à faire notre bonheur malgré nous, et voilà qu'il touche enfin au but. A coups de lois, de normes, d'avantages acquis et de solidarité citoyenne, il a finalement donné jour au Meilleur des Mondes, et il ne manque plus pour que son oeuvre soit parfaite que d'éliminer cette scorie persistante de l'Ordre Ancien, j'ai nommé l'Individu.Après avoir substitué la barre-ruche au pavillon et la teuf au bal du samedi soir bien trop intimiste, Big Brother a décidé de s'en prendre à la voiture. Officiellement, il s'agit de lutter contre la pollution. Officieusement - et il ne faut pas trop pousser les anti-bagnoles pour qu'ils l'admettent - nous avons bien affaire à un projet de société. La bagnole c'est pas bien, d'abord on est tout seul dedans (berk!) et en plus c'est un marqueur social (re-berk!). Et les conducteurs pris dans les embouteillages manquent vraiment de courtoisie. Pas bien, ça, et le Meilleur des Mondes ne saurait le tolérer. Alors on multiplie les tracasseries, les réglementations, les limitations, jusqu'à ce que l'automobiliste découragé vende sa monture (si quelqu'un en veut encore) et rejoigne la joyeuse clientèle des transports en commun.A terme, la solitude, l'isolement ne seront plus que de mauvais souvenirs dont les habitants du Meilleur des Mondes riront ou pleureront entre deux fêtes obligatoires ou rave-parties, avant de regagner leur petite fourmillière bétonnée. Le Nouvel Homme et la Nouvelle Femme se conjugueront au pluriel. Il y aura bien quelques réfractaires au début, mais on en viendra à bout. Big Brother aura ainsi réussi en douceur ce que Hitler et Staline avaient échoué à imposer par la violence: la massification de la société en un troupeau de moutons bien élevés et consensuels. Pas beau, ça?
 
10/14/2004
  Fac de Lyon, piège à cons

Que ferait, que serait le Front National sans l'aide toujours généreusement accordée de ceux que son président appelle "l'Establishment"? On peut se le demander. Le problème, c'est qu'on ne se le demande pas, justement.
Il est en effet évident pour tout observateur tant soit peu dépassionné que le FN n'existe que par la publicité gratuite que lui font ses opposants. Plus ils sont virulents, plus on parle du Front, et rien de tel qu'un lynchage médiatique bien géré pour mobiliser la base et se gagner un électorat.
D'où cette stratégie dite du "dérapage" mise au point par Le Pen au milieu des années quatre-vingts et employée depuis avec un succès jamais démenti. La méthode, il faut le dire, est fort simple et comme le Loto, ne coûte pas (tellement) cher et peut rapporter gros. Chaque fois que Le Pen est en difficulté ou souhaite se rappeller à la mémoire des électeurs, il lui suffit de balancer une plaisanterie douteuse ou une réflexion nauséabonde sur quelque sujet sensible (l'Holocauste, les malades du sida, l'égalité raciale, la liste n'est pas close) et de laisser ensuite les professionnels de l'indignation faire monter la sauce. Une condamnation, avec un peu de chance, viendra jouer les cerises sur le gâteau, ce qui permettra ensuite au Borgne de jouer les martyrs et de flétrir un "Establishment" voué à sa perte. Résultat des courses: le Front National, de confidentiel qu'il était au début des années quatre-vingts, est devenu la Fée Carabosse de la vie politique française, jamais invité mais toujours présent pour mettre la pagaille.
Comme je le disais plus haut, ce sont là des faits accessibles à tout observateur qui fasse l'effort de laisser parler la raison plutôt que l'indignation. Pour cet observateur, la solution au problème frontiste est des plus simples: le Jean-Marie's Band prospérant surtout grâce à la provoc' et aux réactions outragées de ses adversaires, il suffit de l'ignorer pour lui porter un coup sévère et peut-être même fatal. Sans programme véritable ni idées autres que "virons tous les étrangers", le FN aurait bien du mal à survivre si on le privait de la caisse de résonnance offerte par les médias.
Oui mais de tels observateurs sont bien rares en France, comme en témoignent les cris d'orfraies suscités par la toute dernière sortie de Bruno Gollnisch sur un sujet (les chambres à gaz) qui a toujours bien réussi au parti. Les régionales et les européennes avaient marqué un net recul pour le Front National, on n'en parlait pratiquement plus, et le voilà de nouveau sous les feux de l'actualité, grâce aux vigilants combattants de l'antifascisme qui nourrissent la Bête Immonde en croyant la combattre. Bravo, les gars. Maurras est fier de vous.
Comme le disait si bien l'une des références de Gollnisch, "les Français ont la mémoire courte".
 
Raleur, reac et ronchon, d'une mauvaise foi incroyable, Taranne deverse ici sa bile sur le monde moderne. Collectivistes, philoneistes, adeptes de la solidarité obligatoire, de la culture festive et de la subversion conformiste, passez votre chemin. Quant aux autres, asseyez-vous, prenez vos aises. This blog is your home.

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